AVANT-PROPOS : Dans cet article, nous allons parler de crimes sexuels dont les victimes ne sont pas des mineurs, néanmoins, ils étaient de jeunes majeurs et sous la responsabilité de l’agresseur depuis leurs 14 ans. Cela illustre le caractère aggravant et nous avons jugé important de mettre en lumière ces crimes et le courage des plaignants ainsi que pour les soutenir.
Il a fallu de la patience et de la ténacité à Maxime, Julien, Daniel et Nicolas pour qu’ils supportent ces successions de décisions arbitraires de la justice car c’est au bout de quinze ans de procédures judiciaires qu’enfin leur agresseur, le 23 avril 2025, a été condamné pour agressions sexuelles à 18 mois de prison avec sursis . Une peine qui suscite colère et indignation, nous en convenons, mais une victoire pour les victimes ! Nous allons vous parler du combat de quatre hommes touchants et dignes, pour la reconnaissance de leurs abus par la justice.
Nous tenons à saluer le travail de la journaliste Marine Turchi pour son livre «Faute de preuves» où elle tente de comprendre pourquoi autant de victimes s’expriment en dehors de la justice. Elle consacre un chapitre sur les aberrations de la justice et ce qu’ont dû traverser Maxime, Julien,Daniel et Nicolas pour obtenir justice.
Nous soulignons l’enquête de Sophie Boutboul, une journaliste indépendante qui écrit sur les violences faites aux enfants et aux femmes ainsi que les discriminations en général, qui a été la première à investiguer, dès mars 2020, sur cette affaire. Elle a assisté à toutes les audiences et Mediapart a publié son enquête sous forme de plusieurs articles.
Leur travail nous ont permis de réaliser cet article.

PORTRAIT DE JEAN-CHRISTOPHE M. :
Au moment de sa condamnation c’est un homme de 60 ans, célibataire et sans enfant. Fils de gendarme et catholique pratiquant. Au moment des plaintes il était le numéro 2 de la police de la Vienne, c’est-à-dire le chef d’état-major auprès du directeur départemental de la sécurité publique, sous le grade de commandant divisionnaire. Il a été décoré de la médaille d’honneur de la police nationale et gratifié de quarante-huit témoignages élogieux dans son dossier administratif. Il a été en 1998, Officier de police judiciaire, au rang de Capitaine, de la Brigade de sécurité des chemins de fer ( BSCF) en 1998 et commandant de police à Paris en 2007. En même temps que sa carrière dans la policer, il a été chef scout au sein des » Scout de France » à Poitiers, et dirigeait l’unité des « pionniers » qui est la section des 14-17 ans.
Durant les audiences, il avait préféré garder le silence à plusieurs reprises face aux questions des avocats des parties civiles. Il a dénoncé une « orchestration médiatique » et une « présomption de culpabilité ». Une maladresse a pourtant échappé à cet homme qu’un expert psychiatre a décrit dans « l’hyper-contrôle » : « S’il s’est passé quelque chose, ça a complètement été intentionnel… Non intentionnel. ». Ce qui avait déclenché des rires dans le tribunal.
LA GENÈSE :
Les agressions sexuelles se sont déroulées entre 2006 et 2011, lorsqu’ils avaient la vingtaine et le policier la quarantaine, dans un contexte de soirées alcoolisées ou de nuits partagées au camping ou à son domicile. Jean- Christophe M. était chef au Scout de France et encadrait le groupe dont faisaient partie Maxime, son frère Julien, Daniel et Nicolas*, depuis leurs 14 ans. Une fois majeurs, ils avaient gardé contact avec lui, alors à chaque fois que les plaignants venaient à Paris, il leur offrait l’hospitalité.
C’est avril 2008, après un évènement dramatique, le suicide d’un ancien camarade, qu’ils s’étaient retrouvés avec leur ancien chef. Henri souffrait de maniaco dépression et Jean-Christophe M. était devenu son « père spirituel« . A l’époque, des doutes avaient été émis sur les raisons de son geste et qu’il aurait pu être victime également.
Au fur et à mesure, ce groupe d’anciens s’était formé autour de leur chef scout charismatique qui aimait faire la fête et organisait régulièrement des soirées ou week-end toujours alcoolisés. Parfois, Jean-Christophe M. les emmenait à bord de sa voiture de police avec le gyrophare allumé, la sirène en marche et à vive allure dans les rues de Paris.
Les jeunes garçons avaient toute confiance en lui depuis leur adolescence et ressentaient du respect au regard de son statut professionnel. Il incarnait un modèle et pouvait être aussi un confident. Leurs états d’esprit ne laissaient pas de place à une quelconque ambiguïté d’autant plus que Jean-Christophe M. affichait son goût pour les femmes et, à contrario, tenait des propos homophobes. Il était comme un ami et un « père » malgré l’écart d’âge qui les séparaient.
*Nicolas est un prénom d’emprunt.
LES FAITS :
Maxime avait revu Jean-Christophe M. en décembre 2006 à Issy les Moulineaux où s’était passée la première agression sexuelle. Cela s’est produit après une soirée entre anciens scouts. Il reste dormir chez Jean-Christophe M. qui ne souhaite pas déplier le canapé et propose de partager son lit. Aucun souci pour Maxime qui est en toute confiance. Dans la nuit, il lui a touché le sexe, dans un geste de masturbation et lui a décalotté le pénis. Maxime est sidéré et figé et fait semblant de dormir. Il n’en parle à personne durant 5 ans. Il était sous son influence et le déroulé de la procédure judiciaire l’en a détaché. C’était en mars 2016, lors d’une convocation devant la juge où il a été face à son agresseur sans en avoir été informé au préalable alors qu’il y venait en tant que témoin. Julien s’était confié à la journaliste Marine Turchi : « Cette confrontation a été un choc, un basculement, se rappelle-t-il. J’ai perdu l’estime que je conservais malgré tout pour lui, je suis tombé dans la colère, je suis sorti de son influence. ». Lors de cet entretien, Maxime et son frère Julien accepte la proposition de la juge de se porter partie civile. La médiatisation de l’affaire a généré pour Maxime de la terreur car considérant que l’accusé avait peur de ces accusations soit rendue publique et qu’il était détenteur d’une arme à feu, le risque n’était pas improbable.
Son frère ainé, Julien part en séjour en Crète avec Jean-Christophe M. du 15 au 24 octobre 2008 et ils logent dans un hôtel. Ils partagent la même chambre et le même lit. Il se réveille tétanisé en pleine nuit par la main de Jean-Christophe M. sous son caleçon, en train de décalotter son pénis.
En août 2009, Daniel part en séjour avec Jean-Christophe M. dans les gorges du Verdon, dans un camping à Moustiers-Sainte-Marie du 5 au 8 août 2009. Jean-Christophe M. impose qu’ils dorment dans la même tente et sur un seul matelas gonflable. L’ancien chef scout avait apporté de « l’eau-de-vie » et l’aurait incité à boire. Même lorsqu’il a vomi, il a encore insisté pour qu’il boive à nouveau. Dès la première nuit le chef scout a touché le pénis de Daniel et l’a pincé avec deux de ses doigts, ce qui l’avait paralysé de peur. « Je ne pouvais mouvoir aucun membre « , a déclaré Daniel dans son procès-verbal. Il a ensuite senti le sexe en érection de Jean-Christophe M. contre son caleçon, au niveau de l’anus. A la deuxième nuit, il s’était réfugié dans les toilettes pour envoyer un sms à sa sœur Élisabeth pour se confier sur ce qu’il a subi : « Deuxième nuit avec jc et deuxième rapprochement nocturne de sa part, plus de doutes ne sont possibles, vis a vis de ses intentions, rien ne s’est passé mais je balise ! Il semble très malin dans sa démarche […] Je ne sais pas quoi faire : j’aimerais partir ms cela n est pas le plus simple…« . Il ne détaille pas à sa sœur les agressions pour ne pas l’inquiéter mais pour l’en informer mais s’envoie un mail : « Une nouvelle fois, je veux noter pr moi cette fois ci, c e qui c passe cette nuit, d abord en début de nuit vers 3 h du mat. jcse rapproche de moi, je me dis que c ainsi qu il dort et je vois cela sous langle de l affection, rien de plus, et puis il se fait plus oppressant et revient systematiquement apres mes tentatives de le repousser, ensuite il se colle contre moi et me pince la teub avec ses doigts, je me reveille desormais, ne ressens aucune excitation, me sens coincé dans la tente, je reflechis et decide de partir, en quittant la tente, je vois jc la teub a l air, montrant ainsi clairement ses intentions, je pars 15 min, redoute de revenir dans la tente, je le fais ensuite pr prendre mon chargeur et ma serviette et m. isole pour envoyer des textos a zab et puis a moi. « ▶ retranscription fidèle des messages, ce qui explique les fautes. Traumatisé et perdu, Daniel met fin au séjour avant la fin en demandant à sa sœur de venir le chercher très vite. Il coupe tout contact avec l’ancien chef scout. Il consulte son médecin qui lui prescrit des analyses toxicologiques (qui sera négatives) et porte plainte rapidement. Le policier qui le reçoit tente de la dissuader de le faire mais Daniel est déterminé. Durant l’entretien, à l’annonce de l’identité contre est qui la plainte, un des policiers lui montre un trombinoscope de sa promotion à l’École nationale de la police, en 1988, et désigne Jean-Christophe M. : « C’est contre lui que vous portez plainte ? « . Avoir eu comme OPJ un camarade de promo de son agresseur n’avait pas démotivé Daniel. Surtout que les conflits d’intérêts sont très réguliers dans ce dossier. Daniel transmet les coordonnés de Julien et cite un voisin de tente comme témoin mais l’enquêteur a choisi de ne pas le prendre en compte ni même de l’auditionner.
Nicolas a subi les mêmes agressions sexuelles que ses camarades scouts entre janvier 2008 et août 2011. Le traumatisme s’est manifesté au quotidien, car juste après les agressions sexuelles, il dormait les fenêtres ouvertes même par « moins 10 degrés », pour pouvoir s’« échapper » au cas où Jean-Christophe M. ferait irruption chez lui et avait changé de numéro de téléphone.
Tous les quatre décrivent le même modus operandi :
- Provoquer des confidences sur leurs chagrins de leurs ruptures amoureuses.
- Organiser les circonstances et de façon à imposer de dormir dans le même lit.
- Apporter de l’alcool – Insister la jeune victime à boire.
- De se sentir à la limite du coma éthylique, après seulement deux ou trois verres. Suspicion de drogue dans les verres.
En mars 2019, en réaction à l’annonce de la fin de l’instruction et d’un non lieu dix ans Maxime adresse à la juge en charge de leur plainte un courrier où il exprime sa colère face a ce refus du droit à un procès équitable.
Un non-lieu se profile après dix ans de procédure
LES ÉLÉMENTS ET CONFLITS D’INTÉRÊT QUI ONT EMPÊCHÉS LE BON DÉROULÉ DE L’ENQUÊTE ET LE DÉVOILEMENT DE LA VÉRITÉ :
Dans le dossier de Daniel :
- Ne pas avoir auditionné le voisin de tente, le témoin identifié par Daniel.
- Le SMS envoyé à sa soeur sera consigné par le policier avec une date antérieure donc erronée. Cette erreur est grave car ce message envoyé à Élisabeth est une pièce clé pour le plaignant. Cela entraînera confusion dans la compréhension des faits et profitera à la défense.
- D’avoir eu comme OPJ un ancien camarade de promo de Jean-Christophe M.
- Le policier qui l’accueille tente de le dissuader de porter plainte en expliquant que « cela n’aboutirapas « .
De façon générale :
- Dans plusieurs courriers, la fonction de commandant de police de l’accusé est soulignée par le procureur.
- Les relations professionnelles de Jean-Christophe M. dû à sa fonction et qu’il soit aguerri aux procédures judiciaires lui ont permis d’avoir un avantage par rapport aux quatre plaignants, qui eux, en ont pris la mesure tout au long de ces 15 ans de combats.
- En 2015, Un témoin atteste qu’un dîner s’était tenu, regroupant une dizaine de convives, parmi eux, Jean-Christophe M. et le procureur de la République de Poitiers. Un évènement grave compte tenu de l’instruction en cours à La Rochelle qui dépend justement de la cour d’appel de Poitier. Cela démontre également une collusion entre la police et la justice.
- En 2017, Jean-Christophe M. demande et obtient que ce soit l’IGPN de Bordeaux qui enquête. ils ont respecté un code de déontologie « au regard de sa fonction« , ne l’ont pas interrogé avec pugnacité et lui, par exemple, de ne pas avoir révélé les identités de ses anciennes compagnes pour permettre une enquête de personnalité. Ses collègues ne seront pas auditionnés, malgré la demande des plaignants.
- Disproportion des auditions : 3 proches de l’entourage de Jean-Christophe M. auditionnés contre des dizaines de personnes de l’entourage des plaignants ont été interrogées.
- Comme la procédure judiciaire a été transmise de parquet en parquet entre Marseille, Digne-les-Bains et Poitiers, cela avait ralenti l’enquête, et il faudra attendre 1 an pour le premier acte et encore une autre année pour un second.
- Lors des audiences, la thèse de la concertation en vue d’un complot contre Jean-Christophe M. a été mise en avant, reprochant aux quatre plaignants de s’être parler. C’est justement parce qu’ils se sont confié les uns les autres, qu’ils ont trouvé la force de porter plainte. Malgré les preuves matérielles irréfutables.
- Le temps perdu entre avril 2014 et 2015 en se focalisant sur le suicide d’Henri qui s’est produit en 2008.
- Un autre égard accordé par la justice à Jean-Christophe M. : sa fonction de chef d’état-major de Jean-Christophe M. est mise en avant par son avocat pour solliciter un report de sa convocation chez la juge, en juin 2017, car présence est requise pour la sécurisation de la Fête de la musique à Poitiers.
- Lors de cette convocation reportée un mois plus tard en vue de sa « mise en examen », il ressort avec le statut de témoin assisté comme demandé par son avocat, en argumentant sur le « fort impact tant personnel que professionnel » d’une telle décision.
Dans le dossier de Julien et Maxime :
- Julian et Maxime ont été auditionnés plusieurs années ( en 2013) après que Daniel a transmis son numéro au policier.
- Malgré les échanges explicites entre Julien et Jean-Christophe M. après les agressions sexuelles, l’enquêteur a conclu dans son rapport de synthèse ceci : « la vérité semble bien délicate à établir entre les différentes dépositions ».
- Maxime et Julien sont convoqués comme témoins par la juge. Au dernier moment, ils découvrent qu’ils vont être confrontés à Jean-Christophe M. qui est assisté de son avocat, alors qu’eux n’en ont pas. Il a accès au dossier contrairement à eux. Ce moment a été un basculement
- Le manque de combativité des avocats qu’ils avaient choisis au début.
LES VICTIMES SE SONT EXPRIMÉES DURANT LES DIFFÉRENTES AUDIENCES :
Maxime : « Moi, mes souffrances viennent plus de la procédure et du sentiment d’injustice qu’elle a nourri, que de l’agression que je dénonce. Ce parcours judiciaire a été destructeur » , « C’est plus la durée de cette instruction, le fait d’avoir l’impression de ne pas être entendu, de ne pas être cru, qui est difficile à supporter. «
Julien : « Je suis en colère car la justice, en n’ayant jamais mis en examen notre agresseur, et en concluant à un non-lieu après 10 ans d’instruction alors qu’il y a quatre victimes, retient qu’il n’y a pas suffisamment de charges contre notre agresseur pour le traduire devant un tribunal. Comment peuvent être entendues les victimes dans les procès d’agressions sexuelles ?
Maxime : « Je confirme et valide l’enquête de Médiapart. Nous ne souhaitons qu’une seule chose : la tenue d’un procès équitable pour que soit entendue la parole des quatre victimes. Je suis révolté de la manière dont ce dossier a été traité pendant dix ans »
LA CHRONOLOGIE JUDICIAIRE :
Le 14 août 2009 : Première plainte : celle de Daniel
▶Entre les deux plaintes aucune audition ni un début d’enquête préliminaire, bien que le Procureur de Poitiers ait été informé.
Le 17 juin 2012 : Deuxième plainte : celle de Nicolas*.
Aout 2012 : Une instruction est ouverte par le procureur de la Rochelle. Un dépaysement avait été demandé au regard de la position professionnelle de l’accusé, pour éviter les parasitages.
Janvier 2014 : Jean-Christophe M. est arrêté, mis en garde à vue et auditionné. Son domicile et son bureau ont été perquisitionnés. Soit plus de 4 ans après la première plainte. Il dément les accusations.
Février 2024 : Pour la plainte de Julien, concernant les nombreux mails échangés les enquêteurs
Le 17 avril 2014 : Une information judiciaire a été ouverte pour des faits d’agressions sexuelles. L’inspection générale de la police nationale a été saisie (IGPN).
2015 : Un témoin atteste qu’un dîner s’était tenu, regroupant une dizaine de convives, parmi eux, Jean-Christophe M. et le procureur de la République de Poitiers. Un évènement grave compte tenu de l’instruction en cours à La Rochelle qui dépend justement de la cour d’appel de Poitiers. Cela démontre également une collusion entre la police et la justice.
2015 : Un an s’est écoulé depuis l’information judiciaire d’avril 2014 et l’enquête piétine et se focalise sur le suicide d’Henri suite à deux témoignages d’anciens scouts qui avaient reçu ses confidences. Il leur avait relaté s’être réveillé avec le sexe de Jean-Christophe M. contre ses fesses mais sans que ce soit sur le ton du reproche. C’est d’ailleurs ce qu’avait utilisé comme défense l’ancien chef scout : « Ils me rendent coupable de la mort de leur copain et ont inventé tout ça pour se venger« . Les enquêteurs ont conclu qu’ « aucun lien n’est fait entre d’éventuels attouchements subis par le jeune homme et son suicide« .
Mars 2016 : Julien et Maxime sont convoqués en tant que témoins mais ne sont pas informés qu’il s’agit d’une confrontation avec leur agresseur. Situation inégale car il est accompagné de son avocat et pas eux.
Avril 2016 : Constitution de partie civile de Maxime et Julien, entendus dans le cadre de l’enquête ouverte suite aux plaintes de Daniel et Nicolas. C’est la juge qui leur propose cette action, afin d’avoir accès au dossier.
2017 : Côté enquête interne, l’accusé obtient que ce soit l’IGPN de Bordeaux qui soit chargée. Cela ne permettra des investigations honnêtes car ses collègues ne seront pas auditionnés.
Le 12 juillet 2017 : Jean- Christophe M. est entendu sous le statut de témoin assisté, soit plus de trois ans après l’ouverture de l’information judiciaire. Il réfute les accusations.
Durant toute la période de l’enquête, le mis en cause a pu continuer à exercer ses fonctions à la direction départementale de la sécurité publique (DDSP).
Novembre 2017 : Convocation de Jean-Christophe M. en vue de sa mise en examen. Il ne sera pas mis sous contrôle judiciaire mais sous le statut de témoin assisté. C’est ce qu’avait demandé son avocat Maître Lionel Béthune de Moro afin « de ne pas perturber l’accusé dans ses fonctions professionnelles« . Nous pouvons nous poser la question de cette précaution accordée au prévenu.
Fin 2017 : L’avocat de Julien et Maxime informe la juge que ses clients ont de fortes inquiétudes sur la lenteur de la procédure et s’alarme d’un dossier qui semble être littéralement “enterré” ». Ils ne se sentent plus en sécurité après la médiatisation des accusations. Il parle d’ « un certain degré de suspicion » en raison du pouvoir du commandant divisionnaire et de sa fonction policière qui « semble être un argument de défense pour éviter une mise en examen « .
Le 14 février 2019 : Le procureur de la République prononce un non-lieu.
Le 8 août 2019 : La juge d’instruction de la Rochelle suit les réquisitions du procureur et ordonne un non-lieu en mettant l’attitude de Jean-Christophe M. Elle commente sa décision en jugeant que c’était sur le compte de « désirs homosexuels » et « d’initiatives maladroites, voire déplacées » et en estimant que rien ne permettait d’établir que « ces agissements ont été imposés par violence, contrainte, menace ou surprise. ». Elle juge peu crédibles leurs explications concernant leur « absence de refus manifeste ».
Septembre 2019 : Jean-Christophe M. intervient dans le journal « La Nouvelle République » dans un article du 8 août 2019 qui parle des violences conjugales et les prises en charge des victimes où il expliquait que dans la Vienne, il avait mis en place un service dédié. . Les quatre plaignants ont exprimé leur colère de le lire, surtout un mois après le non-lieu.
8 janvier 2020 : Sur les conseils de François Devaux, le fondateur de La Parole libérée, Maxime adresse un mail à la rédaction de Médiapart, au nom de ses co plaignants
2020 : Année où Jean-Christophe a quitté ses fonctions de chef d’état-major, selon ses déclarations auprès de la juge le 10 septembre 2020.
Le 14 février 2020 : Confirmation du non-lieu par le procureur général.
Février 2020 : Après l’annonce du non-lieu, très fatigué moralement, Nicolas décide de ne pas poursuivre en appel mais de continuer le combat en tant que témoin.
2 mars 2020 : La veille de l’audience en appel, Médiapart publie le premier article de Sophie Boutboul sur l’affaire qui fait également l’ouverture du journal régional de France 3.
Le 3 mars 2020 : Une audience à huis clos s’est tenue à la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Poitiers pour statuer sur un possible procès ou non.Le procureur requiert un non-lieu. Les avocats des plaignants dénoncent la position du parquet qui a fait le procès des victimes. Le jugement avait été mis en délibéré au 14 avril 2020.
Le 14 avril 2020 : La chambre de l’instruction de Poitiers a, par son arrêt du 14 avril 2020, considéré que les appels contre l’ordonnance de non-lieu de trois des quatre hommes, âgés aujourd’hui d’une trentaine d’années sachant que les faits présumés remontent à la période 2006-2011, sont recevables et a renvoyé le dossier devant une autre juge d’instruction, il s’agit de la vice-présidente chargée de l’instruction au tribunal judiciaire de La Rochelle. Les faits considérés, et pour lesquelles le policier et les plaignants seront de nouveau entendus, ont, suivant les parties civiles concernées, eu lieu à :
- Issy-Les-Moulineaux, le 20 décembre 2006.
- En Crète, entre le 15 et le 24 octobre 2008.
- A Moustiers-Sainte-Marie (Alpes-de-Haute-Provence), entre le 5 et le 8 août 2009.
En outre, elle a ordonné qu’il soit procédé à un supplément d’information aux fins de la mise en examen de Jean -Christophe M.
Le 27 avril 2020: La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Poitiers (Vienne) a demandé la mise en examen de Jean-Christophe M. pour d’agressions sexuelles sur quatre hommes et n’avait pas suivi le réquisitoire de l’avocat général qui avait pris la défense du policier.
Septembre 2020 : Jean-Christophe M. est mis en examen pour agressions sexuelles.
Début 2021 : Jean-Christophe qui est retiré du service actif depuis quelques mois.
Mars 2021 : Le dossier a été déplacé pour les besoins de l’enquête, l’officier exerçant ses fonctions à Poitiers. Son instruction a été confiée à un juge du tribunal judiciaire de La Rochelle.
2 mars 2021 : Audience à huis clos devant la Chambre de l’instruction de Poitiers.
Le 7 avril 2021 : La Chambre de l’instruction de Poitiers ordonne la tenue d’un procès devant le Tribunal Correctionnel de La Rochelle.
2021 : Jean-Christophe M. a été sanctionné par sa hiérarchie 15 jours avant sa retraite.
Le 13 janvier 2022 : Audience au tribunal correctionnel de la Rochelle. La procureure de la République Soraya Ahras demande la relaxe « au bénéfice du doute«
24 février 2022 : Décision de la relaxe par le Tribunal de La Rochelle et appel du Parquet.
29 mai 2024 : Procès en appel à la Cour d’Appel de Poitiers renvoyé en raison de deux questions prioritaires de constitutionnalité déposées par la défense.
24 juin 2024 : Audience devant la Cour d’Appel de Poitiers pour étudier les deux questions prioritaires de constitutionnalité déposées par la défense.
3 juillet 2024 : Audience de délibéré concernant les deux questions prioritaires de constitutionnalité et décision de maintien du procès en appel.
Le 23 septembre 2024 : Procès en Appel à Poitiers. L’avocat général a requis cinq ans de prison dont quatre avec sursis ainsi que son inscription au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles ou violentes (Fijais).
Le 6 novembre 2024 : Audience de délibéré et condamnation à 18 mois de prison avec sursis par
la Cour d’appel de Poitiers.
Avril 2025 : Rejet puis désistement des pourvois en cassation.
LE PRIX DE LA VÉRITÉ :
Oui il y a un prix à payer pour qu’une victime soit entendue et représentée. Le droit dit que « Toute personne a le droit d’être jugée équitablement et dans un délai raisonnable, par un juge indépendant et impartial« .
Après lecture du déroulé de ces 15 ans de procédure, est-ce que le droit a été appliqué pour Daniel, Nicolas, Julien et Maxime ?
Sans généraliser, nous le savons, avec ces années de combats auprès de parents protecteurs, qu’il est compliqué de trouver un avocat qui se bat réellement pour son client et très couteux au regard des honoraires exorbitants. Daniel, qui a dépensé 26 000 euros de frais d’avocat, a déclaré « Le système judiciaire français, malgré l’apparat de l’équité, est en fait une justice de classe, une justice des puissants. ». Julien n’avait pas eu le droit à l’aide juridictionnelle malgré son statut de demandeur d’emploi en raison d’une épargne qu’il avait. Aux coûts de sa défense se sont rajoutés 8000 euros pour ses soins de thérapie de reconstruction, bien souvent non remboursés par la sécurité sociale ni la mutuelle ou une autre assurance.
Se rajoute le coût moral et psychologique qui ne peut pas se mesurer mais nous imaginons bien les émotions traversées au fur et à mesure que la procédure avançait, qui n’ont permis un bon déroulement du processus de réparation des agressions.
PROTAGONISTES JUDICIAIRES :
- Maître Benoît Chabert : avocat au barreau de Daniel, l’un des plaignants/ partie civile
- Maître Lionel Béthune de Moro : avocat au barreau d’Angoulême de Jean-Christophe M.
- Maître Guillard : avocat au barreau de la Rochelle d’un plaignant
- Soraya Ahras : procureur de la République de La Rochelle. Lors du procès du 13 janvier 2022.
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